Cheval de bataille personnel de Modi, ce projet a pour ambition de catapulter l’Inde dans le club très fermé des pays détenteurs d’un réseau ferroviaire à très grande vitesse et donner un coup de fouet aux projets d’infrastructure à la traîne qui freinent l’économie du pays.
L’Inde a finalement porté son dévolu sur le système ferroviaire japonais Shinkansen, plus communément appelé « Bullet train ». Voilà donc l’objet principal de la visite de Shinzo Abe en Inde : poser la première pierre d’une ligne à grande vitesse indienne, qui reliera Mumbai (Ouest), la capitale financière indienne, au pôle industriel d’Ahmedabad, capitale de l’Etat du Gujarat, dont est originaire Narendra Modi.
Le Japon construira cette ligne dédiée au Shinkansen, longue de 508 kilomètres, qui devrait être achevée d’ici décembre 2023. Toutefois, Piyush Goyal, le nouveau ministre des Chemins de fer, a récemment déclaré à la presse que Narendra Modi avait demandé à ce que le lancement inaugural de la ligne ait lieu le 15 août 2022 célébrant le 75e anniversaire de l’Indépendance de l’Inde.
Le choix du Japon s’est fait sur plusieurs critères. En premier lieu, la sécurité. Le système japonais – l’un des plus vieux réseaux à grande vitesse au monde – n’a connu aucun accident en presque un demi-siècle. L’autre raison étant les excellentes relations géostratégiques entre les deux pays et la connexion personnelle entre Shinzo Abe et Narendra Modi, qui se sont déjà rencontrés une dizaine de fois en trois ans.
Mais le Japon a remporté le marché grâce aux solutions financières qu’il a proposé. Il a offert de financer près de 84% des 1 020 milliards de roupies (15 milliards d’euros) que coûte le projet, grâce à un prêt à long terme au taux réduit de 0,1% d’intérêts. L’Inde aura 50 ans pour le rembourser, assortis d’un moratoire de 15 ans.
Pour éviter la difficile acquisition de terrain – facteur principal des délais de réalisation de la plupart des infrastructures et de projets industriels du pays – Indian Railways (entreprise publique qui exploite le réseau ferroviaire indien) a opté pour une ligne surélevée sur 470 des 508 kilomètres qui séparent Mumbai d’Ahmedabad. Autre défi, sur les 27 kilomètres de tunnel prévus, 7 seront creusés sous la mer.
Piyush Goyal a annoncé que les premiers trains à circuler sur cette ligne seraient composés de 10 voitures, pouvant ainsi transporter 750 passagers, et pourraient passer à 16 voitures par la suite. Il a également indiqué qu’Indian Railways assurerait 70 liaisons quotidiennes sur ce trajet, pour une capacité de 53 000 voyageurs.
Ce projet est capital tant pour le Japon que pour l’Inde. Pour le premier, il s’agit de la première commande étrangère de Shinkansen, la plupart des acheteurs étant refroidis par le coût très élevé des trains. Pour Indian Railways, et son infrastructure ferroviaire défaillante et datant de près d’un siècle, bénéficier des dernières avancées technologiques dans ce domaine pourrait représenter un énorme coup de pouce pour son économie.
D’un extreme à l’autre
En dépit des avantages tangibles, tant psychologiques que réels, le système ferroviaire le plus perfectionné est cependant difficilement conciliable avec l’état actuel du réseau d’Indian Railways. Le quatrième plus grand réseau ferroviaire au monde, long de plus de 70 000 kilomètres, transporte quotidiennement quelques 25 millions de passagers et plus de trois millions de tonnes de marchandises.
Toutefois, le peu d’investissements consacré à leur renouvellement et leur entretien laisse la plupart des voies et des systèmes de signalisation obsolètes et en mauvais état. A l’heure actuelle, l’Inde ne renouvelle que 1 200 kilomètres de voies chaque année et la modernisation de l’intégralité du réseau ne sera pas achevée avant 50 ans, date à laquelle il faudra à nouveau tout recommencer.
La désuétude et la congestion du réseau se traduisent par une forte hausse des accidents et des morts. Ces cinq dernières années, 242 des 436 accidents recensés étaient dus à des déraillements. Le nombre de morts dans ces accidents est passé de 81 en 2012 à 238 l’an passé.
Priorités mal établies
C’est le manque d’argent qui ronge Indian Railways. Le réseau requiert plus de 45 milliards d’euros pour pouvoir répondre à ses besoins jusqu’en mars 2020. Toutefois, si le Gouvernement lui a alloué 5 à 6 milliards d’euros par an, Indian Railways n’en a dépensé que moins de la moitié au cours des dernières années, accentuant ainsi son retard de développement. Le coût total pour l’ensemble des investissements de la ligne à grande vitesse avoisine en moyenne 500 milliards de roupies (6,5 milliards d’euros) par an.
Avec 1,54 million d’employés et des recettes sous pression en raison du tarif peu élevé des billets passagers et de la forte concurrence du transport routier de marchandises, Indian Railways n’a pas su maîtriser son budget. Cette situation financière entraînant un retard dans l’embauche de postes clef comme le personnel affecté à la sécurité. Une estimation indique qu’il manque 100 000 agents assignés à l’inspection des voies et à d’autres tâches essentielles à la sécurité.
Ce n’est que récemment que la société s’est engagée à installer des GPS pour suivre plus rigoureusement ses trains. Le renouvellement des équipements de signalisation, quant à lui, avance à pas de tortue.
Malgré le bel effort consenti sur la propreté, l’état général des trains indiens laisse grandement à désiré et mêmes les « prestigieux » Shatabdi et Rajdhani ont un aspect vétuste et fatigué. La vitesse moyenne des trains indiens est de 40 kilomètres/heure, et les Shatabdis pointent à peine plus vite, sous les 50 kilomètres/heure. La ponctualité s’est fortement détériorée ces dernières années, avec des retards quotidiens, de plusieurs heures, sans autre raison que la congestion du réseau.
Chacun des 25 millions d’utilisateurs quotidiens du réseau ferroviaire indien pâtit de cette situation. Ces derniers demandent au gouvernement de résoudre d’abord ces problèmes qui nuisent à l’ensemble des usagers plutôt que d’engager des dépenses ou emprunter de l’argent à destination d’un projet pharaonique qui, même dans le meilleur des cas, ne fera que souligner l’état déplorable dans lequel se trouve le reste du réseau.
L’Inde a finalement porté son dévolu sur le système ferroviaire japonais Shinkansen, plus communément appelé « Bullet train ». Voilà donc l’objet principal de la visite de Shinzo Abe en Inde : poser la première pierre d’une ligne à grande vitesse indienne, qui reliera Mumbai (Ouest), la capitale financière indienne, au pôle industriel d’Ahmedabad, capitale de l’Etat du Gujarat, dont est originaire Narendra Modi.
Le Japon construira cette ligne dédiée au Shinkansen, longue de 508 kilomètres, qui devrait être achevée d’ici décembre 2023. Toutefois, Piyush Goyal, le nouveau ministre des Chemins de fer, a récemment déclaré à la presse que Narendra Modi avait demandé à ce que le lancement inaugural de la ligne ait lieu le 15 août 2022 célébrant le 75e anniversaire de l’Indépendance de l’Inde.
Le choix du Japon s’est fait sur plusieurs critères. En premier lieu, la sécurité. Le système japonais – l’un des plus vieux réseaux à grande vitesse au monde – n’a connu aucun accident en presque un demi-siècle. L’autre raison étant les excellentes relations géostratégiques entre les deux pays et la connexion personnelle entre Shinzo Abe et Narendra Modi, qui se sont déjà rencontrés une dizaine de fois en trois ans.
Mais le Japon a remporté le marché grâce aux solutions financières qu’il a proposé. Il a offert de financer près de 84% des 1 020 milliards de roupies (15 milliards d’euros) que coûte le projet, grâce à un prêt à long terme au taux réduit de 0,1% d’intérêts. L’Inde aura 50 ans pour le rembourser, assortis d’un moratoire de 15 ans.
Pour éviter la difficile acquisition de terrain – facteur principal des délais de réalisation de la plupart des infrastructures et de projets industriels du pays – Indian Railways (entreprise publique qui exploite le réseau ferroviaire indien) a opté pour une ligne surélevée sur 470 des 508 kilomètres qui séparent Mumbai d’Ahmedabad. Autre défi, sur les 27 kilomètres de tunnel prévus, 7 seront creusés sous la mer.
Piyush Goyal a annoncé que les premiers trains à circuler sur cette ligne seraient composés de 10 voitures, pouvant ainsi transporter 750 passagers, et pourraient passer à 16 voitures par la suite. Il a également indiqué qu’Indian Railways assurerait 70 liaisons quotidiennes sur ce trajet, pour une capacité de 53 000 voyageurs.
Ce projet est capital tant pour le Japon que pour l’Inde. Pour le premier, il s’agit de la première commande étrangère de Shinkansen, la plupart des acheteurs étant refroidis par le coût très élevé des trains. Pour Indian Railways, et son infrastructure ferroviaire défaillante et datant de près d’un siècle, bénéficier des dernières avancées technologiques dans ce domaine pourrait représenter un énorme coup de pouce pour son économie.
D’un extreme à l’autre
En dépit des avantages tangibles, tant psychologiques que réels, le système ferroviaire le plus perfectionné est cependant difficilement conciliable avec l’état actuel du réseau d’Indian Railways. Le quatrième plus grand réseau ferroviaire au monde, long de plus de 70 000 kilomètres, transporte quotidiennement quelques 25 millions de passagers et plus de trois millions de tonnes de marchandises.
Toutefois, le peu d’investissements consacré à leur renouvellement et leur entretien laisse la plupart des voies et des systèmes de signalisation obsolètes et en mauvais état. A l’heure actuelle, l’Inde ne renouvelle que 1 200 kilomètres de voies chaque année et la modernisation de l’intégralité du réseau ne sera pas achevée avant 50 ans, date à laquelle il faudra à nouveau tout recommencer.
La désuétude et la congestion du réseau se traduisent par une forte hausse des accidents et des morts. Ces cinq dernières années, 242 des 436 accidents recensés étaient dus à des déraillements. Le nombre de morts dans ces accidents est passé de 81 en 2012 à 238 l’an passé.
Priorités mal établies
C’est le manque d’argent qui ronge Indian Railways. Le réseau requiert plus de 45 milliards d’euros pour pouvoir répondre à ses besoins jusqu’en mars 2020. Toutefois, si le Gouvernement lui a alloué 5 à 6 milliards d’euros par an, Indian Railways n’en a dépensé que moins de la moitié au cours des dernières années, accentuant ainsi son retard de développement. Le coût total pour l’ensemble des investissements de la ligne à grande vitesse avoisine en moyenne 500 milliards de roupies (6,5 milliards d’euros) par an.
Avec 1,54 million d’employés et des recettes sous pression en raison du tarif peu élevé des billets passagers et de la forte concurrence du transport routier de marchandises, Indian Railways n’a pas su maîtriser son budget. Cette situation financière entraînant un retard dans l’embauche de postes clef comme le personnel affecté à la sécurité. Une estimation indique qu’il manque 100 000 agents assignés à l’inspection des voies et à d’autres tâches essentielles à la sécurité.
Ce n’est que récemment que la société s’est engagée à installer des GPS pour suivre plus rigoureusement ses trains. Le renouvellement des équipements de signalisation, quant à lui, avance à pas de tortue.
Malgré le bel effort consenti sur la propreté, l’état général des trains indiens laisse grandement à désiré et mêmes les « prestigieux » Shatabdi et Rajdhani ont un aspect vétuste et fatigué. La vitesse moyenne des trains indiens est de 40 kilomètres/heure, et les Shatabdis pointent à peine plus vite, sous les 50 kilomètres/heure. La ponctualité s’est fortement détériorée ces dernières années, avec des retards quotidiens, de plusieurs heures, sans autre raison que la congestion du réseau.
Chacun des 25 millions d’utilisateurs quotidiens du réseau ferroviaire indien pâtit de cette situation. Ces derniers demandent au gouvernement de résoudre d’abord ces problèmes qui nuisent à l’ensemble des usagers plutôt que d’engager des dépenses ou emprunter de l’argent à destination d’un projet pharaonique qui, même dans le meilleur des cas, ne fera que souligner l’état déplorable dans lequel se trouve le reste du réseau.